La banque privée zurichoise a précisé l’étendue des crédits qu’elle a accordés au groupe Signa, propriétaire de Globus en Suisse et en grandes difficultés. Julius Baer n’exclut pas de nouvelles provisions, au-delà des 70 millions déjà mis de côté dans ce dossier
La provision sur crédit de 70 millions de francs enregistrée par Julius Bär, que la banque avait divulgué fin novembre, est principalement liée à «la plus grande exposition unique» dans son portefeuille de crédits privés. Cette dernière est liée à l’investisseur autrichien en difficulté René Benko, a indiqué une source à l’agence AWP.
La valeur totale de cette exposition s’élève à 606 millions de francs, répartie en trois prêts accordés «à des entités différentes au sein d’un conglomérat européen», selon un communiqué publié lundi.
Selon des articles de presse, la banque aurait été affectée par les déboires financiers de l’investisseur René Benko, propriétaire du groupe Signa. L’Autrichien en difficulté et ses entreprises auraient obtenu des crédits de plus d’un demi-milliard de francs chez Julius Bär, avait récemment affirmé le portail d’information Inside Paradeplatz. La banque zurichoise aurait financé il y a quatre ans l’achat des grands magasins Globus par M. Benko et ses partenaires thaïlandais.
### Quelle valeur du collatéral?
Les prêts à cette entité sont garantis par des contreparties liées à de l’immobilier commercial et au secteur du luxe. Le gestionnaire de fortune a indiqué avoir «pris des mesures pour protéger ses intérêts et préserver la valeur des contreparties». Ce portefeuille de crédits doit maintenant être restructuré, sans plus de précision. Lundi matin, la banque a aussi précisé qu’elle resterait prudente et pourrait constituer de nouvelles provisions «si et quand cela s’avère nécessaire».
Pour l’analyste Andreas Venditti, «la principale question demeure très incertaine: combien de collatéral (garanties, ndlr) possède Julius Baer et quelle est sa valeur», vu la restructuration en cours? Le spécialiste de Vontobel relève également que suite à cette affaire, Julius Baer va passer en revue son activité de dette privée et le cadre dans lequel elle est menée.
Même dans le cas éventuel d’une perte totale sur ce portefeuille de crédits, le ratio de fonds propres durs (CET 1) du groupe Julius Baer serait supérieur à 14% et la banque «serait nettement profitable», a encore affirmé l’établissement.
### Julius Bär encore solide
Fin octobre, le portefeuille de crédits privés s’élevait au total à 1,5 milliard de francs et l’ensemble des prêts accordés par la banque à 41 milliards. Les deux autres plus importants prêts à des particuliers s’élèvent à 216 millions et 140 millions et ne sont pas liés au secteur immobilier.
«Nous regrettons qu’une seule exposition ait créé des incertitudes pour nos actionnaires», a dit le directeur général Philipp Rickenbacher, cité dans le communiqué, ajoutant que l’établissement zurichois «est très bien capitalisé», le ratio de fonds propres durs CET 1 se situant à 16,1% fin octobre. Face à ces difficultés, le patron a indiqué que le groupe allait revoir son activité de prêt aux particuliers fortunés.
### Une alerte en novembre
Fin novembre, la banque avait averti qu’elle tablait cette année sur un résultat net annuel inférieur à celui enregistré en 2022, année où elle avait inscrit un bénéfice net (IFRS) de 950 millions de francs, en raison d’une hausse des provisions sur crédits de 82 millions et d’une augmentation du taux d’imposition.
Julius Bär a dans la foulée confirmé son objectif de reverser environ la moitié du bénéfice net ajusté aux actionnaires, le dividende par action devant au moins être comparable à celui de l’exercice précédent.